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A guide to understading figures of speech£5.00

Title: Maupassant Contes et Nouvelles
Description: A selection of stories and novelles written by Guy de Maupassant. Very easy to read and to help you expand your vocabulary.

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Guy de Maupassant (1850-1893)
Contes et nouvelles

AMOUR
TROIS PAGES DU LIVRE D'UN CHASSEUR
Je viens de lire dans un fait divers de journal un drame de
passion
...
Qu'importent Il
et Elle ? Leur amour seul m'importe ; et il ne m'intéresse point
parce qu'il m'attendrit ou parce qu'il m'étonne, ou parce qu'il
m'émeut ou parce qu'il me fait songer, mais parce qu'il me
rappelle un souvenir de ma jeunesse, un étrange souvenir de
chasse où m'est apparu l'Amour comme apparaissaient aux
premiers chrétiens des croix au milieu du ciel
...
J'aime
la chasse avec passion ; et la bête saignante, le sang sur les plumes,
le sang sur mes mains, me crispent le coeur à le faire défaillir
...
Mon cousin, gaillard de quarante ans, roux, très fort
et très barbu, gentilhomme de campagne, demi-brute aimable,
d'un caractère gai, doué de cet esprit gaulois qui rend agréable la
médiocrité, habitait une sorte de ferme-château dans une vallée
où coulait une rivière
...
On y tuait des aigles quelquefois ;
et les oiseaux de passage, ceux qui presque jamais ne viennent en
nos pays trop peuplés, s'arrêtaient presque infailliblement dans
ces branchages séculaires comme s'ils eussent connu ou reconnu
un petit coin de forêt des anciens temps demeuré là pour leur
servir d'abri en leur courte étape nocturne
...
Ce marais, la
plus admirable région de chasse que j'aie jamais vue, était tout le
souci de mon cousin qui l'entretenait comme un parc
...

J'aime l'eau d'une passion désordonnée : la mer, bien que trop
grande, trop remuante, impossible à posséder, les rivières si jolies,
mais qui passent, qui fuient, qui s'en vont, et les marais surtout où
palpite toute l'existence inconnue des bêtes aquatiques
...
Rien n'est plus troublant,
plus inquiétant, plus effrayant, parfois qu'un marécage
...

Non
...
Il gelait à fendre les pierres
...

Nous devions partir à trois heures et demie du matin, afin
d'arriver vers quatre heures et demie au point choisi pour notre
affût
...

Mon cousin se frottait les mains : " Je n'ai jamais vu une gelée
pareille disait-il, nous avions déjà douze degrés sous zéro à six
heures du soir
...

À trois heures sonnantes on me réveilla
...
Après avoir avalé chacun deux tasses de café
brûlant suivies de deux verres de fine champagne, nous partîmes
accompagnés d'un garde et de nos chiens : Plongeon et Pierrot
...

C'était une de ces nuits où la terre semble morte de froid
...

La lune, à son dernier quartier, toute penchée sur le côté, toute
pâle, paraissait défaillante au milieu de l'espace, et si faible qu'elle
ne pouvait plus s'en aller, qu'elle restait là-haut, saisie aussi,
paralysée par la rigueur du ciel
...

3

Nous allions, côte à côte, Karl et moi, le dos courbé, les mains
dans nos poches et le fusil sous le bras
...

Nous fûmes bientôt au bord du marais, et nous nous
engageâmes dans une des allées de roseaux secs qui s'avançaient
à travers cette forêt basse
...
Il était mort, celui-là, mort de froid,
puisque nous marchions dessus, au milieu de son peuple de joncs
desséchés
...
J'y entrai, et
comme nous avions encore près d'une heure à attendre le réveil
des oiseaux errants, je me roulai dans ma couverture pour essayer
de me réchauffer
...

Mais le froid du marais gelé, le froid de ces murailles, le froid
tombé du firmament me pénétra bientôt d'une façon si terrible,
que je me mis à tousser
...
" Et il donna l'ordre au garde
de couper des roseaux
...

Karl, resté dehors, me cria : " Viens donc voir ! " Je sortis et je
restai éperdu d'étonnement
...
Et dedans, on voyait deux formes
4

fantastiques, celles de nos chiens qui se chauffaient
...
La lueur de notre foyer réveillait les oiseaux sauvages
...
Il
me semble à cette heure glaciale de l'aube, que ce cri fuyant
emporté par les plumes d'une bête est un soupir de l'âme du
monde !
Karl disait : " Éteignez le feu
...
"
Le ciel en effet commençait à pâlir, et les bandes de canards
traînaient de longues taches rapides, vite effacées, sur le
firmament
...

Alors, de minute en minute, tantôt lui et tantôt moi, nous
ajustions vivement dès qu'apparaissait au-dessus des roseaux
l'ombre d'une tribu volante
...

Le jour s'était levé, un jour clair et bleu ; le soleil apparaissait au
fond de la vallée et nous songions à repartir, quand deux oiseaux,
le col droit et les ailes tendues, glissèrent brusquement sur nos
têtes
...
Un d'eux tomba presque à mes pieds
...
Alors, dans l'espace au-dessus de moi,
une voix, une voix d'oiseau cria
...

Karl, à genoux, le fusil à l'épaule, l'oeil ardent, la guettait,
attendant qu'elle fût assez proche
...
"
Certes, il ne s'en allait point ; il tournoyait toujours et pleurait
autour de nous
...

Parfois, il s'enfuyait sous la menace du fusil qui suivait son vol ;
5

il semblait prêt à continuer sa route, tout seul à travers le ciel
...

" Laisse-la par terre, me dit Karl, il approchera tout à l'heure
...

Karl tira ; ce fut comme si on avait coupé la corde qui tenait
suspendu l'oiseau
...
Et Pierrot me le rapporta
...
et je repartis, ce
jour-là, pour Paris
...
J'ai vu
depuis tant de choses sinistres, émouvantes ou terribles, que je
m'étonne de ne pouvoir passer un jour, un seul jour, sans que la
figure de la mère Clochette ne se retrace devant mes yeux, telle
que je la connus, autrefois, voilà si longtemps, quand j'avais dix ou
douze ans
...
Mes
parents habitaient une de ces demeures de campagne appelées
châteaux, et qui sont simplement d'antiques maisons à toit aigu,
dont dépendent quatre ou cinq fermes groupées autour
...

Donc, tous les mardis, la mère Clochette arrivait entre six heures
et demie et sept heures du matin et montait aussitôt dans la
lingerie se mettre au travail
...
Elle en avait sur le nez, sous le nez, autour
des yeux, sur le menton, sur les joues; et ses sourcils d'une
épaisseur et d'une longueur extravagantes, tout gris, touffus,
hérissés, avaient tout à fait l'air d'une paire de moustaches placées
là par erreur
...
Quand elle posait sur sa bonne
jambe son grand corps osseux et dévié, elle semblait prendre son

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élan pour monter sur une vague monstrueuse, puis, tout à coup,
elle plongeait comme pour disparaître dans un abîme, elle
s'enfonçait dans le sol
...

J'adorais cette mère Clochette
...
Dès que j'arrivais, elle me forçait à prendre cette
chaufferette et à m'asseoir dessus pour ne pas m'enrhumer dans
cette vaste pièce froide, placée sous le toit
...

Elle me contait des histoires, tout en reprisant le linge avec ses
longs doigts crochus, qui étaient vifs; ses yeux derrière ses
lunettes aux verres grossissants, car l'âge avait affaibli sa vue, me
paraissaient énormes, étrangement profonds, doubles
...
Elle voyait gros et simple
...

Elle me contait ces naïves aventures de telle façon qu'elles
prenaient en mon esprit des proportions de drames inoubliables,
de poèmes grandioses et mystérieux; et les contes ingénieux
inventés par des poètes et que me narrait ma mère le soir,
n'avaient point cette saveur, cette ampleur, cette puissance des
récits de la paysanne
...
Je me rappelle tout cela
aussi nettement que les choses d'hier
...
Une de ses jambes, dans un bas bleu,
la grande sans doute, s'allongeait sous sa chaise, et les lunettes
brillaient au pied de la muraille, ayant roulé loin d'elle
...
On accourut; et j'appris
au bout de quelques minutes que la mère Clochette était morte
...
Je descendis à petits pas dans le salon
et j'allai me cacher dans un coin sombre, au fond d'une immense
et antique bergère où je me mis à genoux pour pleurer
...

Tout à coup on entra avec une lampe, mais on ne me vit pas et
j'entendis mon père et ma mère causer avec le médecin, dont je
reconnus la voix
...
Je n'y compris rien d'ailleurs
...

Il parlait toujours; et ce qu'il dit alors me reste et me restera
gravé dans l'âme jusqu'à ma mort! Je crois que je puis reproduire
même presque absolument les termes dont il se servit
...

Elle se cassa la jambe le jour de mon arrivée et je n'avais pas eu le
temps de me laver les mains en descendant de la diligence quand
on vint me quérir en toute hâte, car c'était grave, très grave
...
Maintenant qu'elle est morte, je puis être moins
discret
...
Toutes les filles lui couraient après, et il faisait le
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dédaigneux, ayant grand-peur d'ailleurs du maître d'école, son
supérieur, le père Grabu, qui n'était pas bien levé tous les jours
...
L'aide instituteur distingua cette
belle fillette, qui fut sans doute flattée d'être choisie par cet
imprenable conquérant; toujours est-il qu'elle l'aima, et qu'il
obtint un premier rendez-vous, dans le grenier de l'école, à la fin
d'un jour de couture, la nuit venue
...
Il l'y
rejoignit bientôt, et il commençait à lui conter fleurette, quand la
porte de ce grenier s'ouvrit de nouveau et le maître d'école parut
et demanda:
"Qu'est-ce que vous faites là-haut, Sigisbert?"
Sentant qu'il serait pris, le jeune instituteur, affolé, répondit
stupidement:
"J'étais monté me reposer un peu sur les bottes, monsieur
Grabu
...
Je vais perdre ma place, sauvez-vous,
cachez-vous!" Le maître d'école entendant murmurer, reprit:
"Vous n'êtes donc pas seul ici?
- Mais oui, monsieur Grabu!
- Mais non, puisque vous parlez
...

- C'est ce que je vais savoir, reprit le vieux; et fermant la porte à
double tour, il descendit chercher une chandelle
...
Vous allez me mettre
sans pain pour toute ma vie
...

Cachez-vous donc!"
On entendait la clef qui tournait de nouveau dans la serrure
...

Et elle sauta
...

Un quart d'heure plus tard, M
...
La jeune fille était restée au pied du mur
incapable de se lever, étant tombée de deux étages
...
Il pleuvait à verse, et j'apportai chez moi cette
malheureuse dont la jambe droite était brisée à trois places, et
dont les os avaient crevé les chairs
...
: "Je suis punie,
bien punie!"
Je fis venir du secours et les parents de l'ouvrière, à qui je contai
la fable d'une voiture emportée qui l'avait renversée et estropiée
devant ma porte
...

Voilà! Et je dis que cette femme fut une héroïne, de la race de
celles qui accomplissent les plus belles actions historiques
...
Elle est morte vierge
...

Le médecin s'était tu
...
Papa prononça quelques
mots que je ne saisis pas bien; puis ils s'en allèrent
...

On emportait le corps de Clochette
...
Maître Lebrument venait d'acheter
l'étude de notaire de maître Papillon ; il fallait, bien entendu, de
l'argent pour la payer ; et Mlle Jeanne Cordier avait trois cent mille
francs liquides, en billets de banque et en titres au porteur
...

Mlle Cordier avait de la grâce et de la fraîcheur, de la grâce un
peu gauche et de la fraîcheur un peu fagotée ; mais c'était, en
somme, une belle fille désirable et fêtable
...

On admira fort les mariés, qui rentrèrent cacher leur bonheur
au domicile conjugal, ayant résolu de faire tout simplement un
petit voyage à Paris après quelques jours de tête-à-tête
...
Il avait pris pour
devise : "Tout vient à point à qui sait attendre
...
Le succès fut rapide et complet
...

Elle ne pouvait plus se passer de lui, il fallait qu'elle l'eût tout le
jour près d'elle pour le caresser, l'embrasser lui tripoter les mains,
la barbe, le nez, etc
...
" Il
ouvrait la bouche avec confiance, fermait les yeux à moitié, et il
recevait un bon baiser bien tendre, bien long, qui lui faisait passer
de grands frissons dans le dos
...

Une fois la première semaine écoulée, il dit à sa jeune

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compagne :
"Si tu veux, nous partirons pour Paris mardi prochain
...
" Elle sautait de joie
...
" Il reprit :
"Et puis, comme il ne faut rien oublier, préviens ton père de
tenir ta dot toute prête ; je l'emporterai avec nous et je paierai par
la même occasion maître Papillon
...
" Et il la saisit dans ses bras pour
recommencer le petit jeu de tendresse qu'elle aimait tant, depuis
huit jours
...

Le beau-père disait :
"Je vous jure que c'est imprudent d'emporter tant d'argent dans
votre portefeuille
...

"Ne vous inquiétez de rien, beau-papa, j'ai l'habitude de ces
choses-là
...
De cette façon, au
moins, nous évitons un tas de formalités et un tas de retards
...
"
L'employé criait :
"Les voyageurs pour Paris en voiture
...

Lebrument murmura à l'oreille de sa femme :
"C'est ennuyeux, je ne pourrai pas fumer"
...
" Le train siffla et partit
...

Dès qu'ils furent dans la cour de la gare Saint-Lazare, maître
Lebrument dit à sa femme :
"Si tu veux, ma chérie, nous allons d'abord déjeuner au
boulevard ; puis nous reviendrons tranquillement chercher notre
malle pour la porter à l'hôtel
...
Est-ce loin ?" Il reprit :
"Oui, un peu loin, mais nous allons prendre l'omnibus
...

- C'est vrai", dit-elle, un peu confuse
...
Lebrument
cria :
"Conducteur ! eh ! conducteur !" La lourde voiture s'arrêta
...
Elle n'eut pas le temps
de répondre ; le conducteur, qui l'avait saisie par le bras pour
l'aider à escalader le marchepied, la précipita dans sa voiture, et
elle tomba, effarée, sur une banquette, regardant avec stupeur par
la vitre de derrière, les pieds de son mari qui grimpait sur
l'impériale
...

Tous les autres voyageurs, alignés et muets - un garçon épicier
une ouvrière, un sergent d'infanterie, un monsieur à lunettes d'or
coiffé d'un chapeau de soie aux bords énormes et relevés comme
des gouttières, deux dames à l'air important et grincheux, qui
semblaient dire par leur attitude : "Nous sommes ici, mais nous
valons mieux que ça", deux bonnes soeurs, une fille en cheveux et
un croque-mort, avaient l'air d'une collection de caricatures, d'un
musée des grotesques, d'une série de charges de la face humaine,
semblables à ces rangées de pantins comiques qu'on abat, dans les
foires, avec des balles
...

La jeune femme demeurait inerte :
"Pourquoi n'est-il pas venu avec moi ?" se disait-elle
...
Il aurait bien pu, vraiment, se priver
de cette cigarette
...

On repartit, puis on s'arrêta de nouveau
...
Elle s'assit et posa sur ses genoux son
panier aux provisions
...

"C'est plus loin que je n'aurais cru", pensait Jeanne
...
La fille en cheveux eut pour successeur un
commissionnaire dont les pieds exhalaient le parfum de ses
courses
...

D'autres personnes descendirent, d'autres montèrent
...

"Comme c'est loin ! se disait Jeanne
...
" Peu à peu tous les voyageurs s'en allaient
...
Le conducteur cria :
"Vaugirard !"
Comme elle ne bougeait point, il répéta :
"Vaugirard !"
Elle le regarda, comprenant que ce mot s'adressait à elle,
puisqu'elle n'avait plus de voisins
...

- Est-ce loin du boulevard ? dit-elle
...

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- Il y a beau temps qu'il est passé !
- Ah ! voulez-vous bien prévenir mon mari ?
- Votre mari ? Où ça ?
- Mais sur l'impériale
...
" Elle
eut un geste de terreur
...
Il est monté avec moi
...
Décanillez, c'est fini
...
" Des larmes lui montaient aux yeux, elle insista :
"Mais, monsieur vous vous trompez, je vous assure que vous
vous trompez
...
"
L'employé se mit à rire :
"Un gros portefeuille
...

C'est égal, il vous a bien lâchée, ah ! ah ! ah !
...
Elle en sortit, et regarda, malgré elle, d'un mouvement
instinctif de l'oeil, sur le toit de l'omnibus
...

Alors elle se mit à pleurer et tout haut, sans songer qu'on
l'écoutait et qu'on la regardait, elle prononça :
"Qu'est-ce que je vais devenir ?"
L'inspecteur du bureau s'approcha :
"Qu'y a-t-il ?"
Le conducteur répondit d'un ton goguenard :
"C'est une dame que son époux a lâchée en route
...
"
Et il tourna les talons
...
Où allait-elle
aller ? Qu'allait-elle faire ? Que lui était-il arrivé à lui ? D'où
venaient une pareille erreur un pareil oubli, une pareille méprise,
une si incroyable distraction ? Elle avait deux francs dans sa
poche
...

Elle possédait juste de quoi payer la course du fiacre ; elle se fit
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conduire chez lui
...
Il portait, ainsi que Lebrument, un gros portefeuille
sous le bras
...

"Henry !" cria-t-elle
...
ici ?
...
Que faites-vous, d'où venezvous ?"
Elle balbutia, les yeux pleins de larmes
...

- Perdu, où ça ?
- Sur un omnibus
...
Oh !
...

Il l'écoutait, réfléchissant
...

- Bon
...

- Votre dot ?
...
pour payer son étude tantôt
...
" Elle ne comprenait pas encore
...

"
...
vous dites ?
...
votre capital
...
" Elle
restait debout, suffoquée, murmurant :
"Alors c'est
...
c'est un misérable !
...

Comme on s'arrêtait pour les regarder, il la poussa, tout
doucement, sous l'entrée de sa maison, et, la soutenant par la
taille, il lui fit monter son escalier et comme sa bonne interdite
ouvrait la porte, il commanda :
"Sophie, courez au restaurant chercher un déjeuner pour deux
personnes
...
"

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Title: Maupassant Contes et Nouvelles
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